Très souvent, le contrat d’architecture exclut expressément de sa mission les études techniques, dont celles relatives notamment à la stabilité, souvent le contrat énonce que:
« les études techniques, spécialisées en matière de béton armé ou autres, sont en dehors de la mission architecturale conférée à l’architecte. Celui – ci aura cependant pour devoir de coordonner ces études avec les plans généraux de la construction ».
Par ce type de clause contractuelle, il est clair que l'architecte entend se décharger de sa responsabilité en ce qui concerne les études de stabilité.
Cette situation est parfaitement normale à partir du moment où bon nombre d'architectes ont exclusivement la qualité d’architecte et en aucun cas celle d’ingénieur architecte et ce faisant, il exclut de sa mission la problématique de la stabilité dont il ne dispose pas des compétences.
Il faut retenir que l'appréciation de la faute se fait "in concreto" et qu'il faudra apprécier celle-ci par rapport à la formation concrète de l'architecte, notamment s'il est ingénieur architecte, l'appréciation pourra être plus sévère.
La Cour de cassation a rendu un arrêt majeur en date du 3 mars 1978 qui a estimé licite le principe qu’un architecte puisse se décharger, même implicitement, de sa responsabilité quant à certaines études techniques, comme le béton et la stabilité.
L’arrêt de la Cour de Cassation en date du 3 mars 1978 énonce :
« Attendu que, si l’on peut admettre, eu égard à la haute technicité actuelle de certaines études relevant du secteur de la construction, que l’architecte peut, même implicitement, se décharger à l’égard du Maître de l’ouvrage de sa responsabilité quant à certaines études techniques, comme l’étude du béton et les calculs de résistance de matériaux, pour lesquelles il n’a reçu aucune formation et qui, dès lors, échappent à sa compétence, les dispositions de l’article 1792 du Code civil et la loi du 20 février 1939 requièrent cependant que, dans l’appréciation de la responsabilité de l’architecte, il soit toujours examiné en fait si le choix du technicien consulté par l’architecte était de notoriété publique un bon choix et, en tout cas, si l’erreur commise par ce technicien était de telle nature que, eu égard aux connaissances professionnelles de l’architecte, qui peut d’ailleurs être un ingénieur, elle pouvait être découverte par lui ;
Attendu qu’il s’ensuit que la Cour d’appel, qui se borne à déclarer de manière absolue que les défendeurs ne peuvent être rendus responsables des fautes éventuelles commises par le bureau d’études et qu’ils n’étaient nullement tenus de vérifier l’exactitude de l’étude du béton, sans examiner les éléments de fait précités, ne justifie pas légalement sa décision ».
Bon nombre de commentateurs et plaideurs n'ont jamais lu l'arrêt précité et ont perdu de vue un élément essentiel de cet arrêt, en ce que le bureau d’études n’avait pas contracté avec le Maître de l’ouvrage mais avec l’architecte, de telle manière que la motivation de l’arrêt qui vise la vérification par l’architecte des erreurs de SON bureau d’études s’explique principalement, voire exclusivement par le fait que le bureau d’études était alors le sous-traitant de l’architecte.
On ne saura jamais si la Cour de Cassation aurait estimé de la même manière si comme, c'est plus souvent le cas aujourd'hui, le maître de l'ouvrage fait appel à un architecte et à un bureau d'étude avec lequel il contracte en direct.
Depuis lors, la jurisprudence n'a plus jamais opéré la distinction pourtant essentielle de savoir qui est le cocontractant de l'ingénieur pour l'appréciation des responsabilités.
Une chose est cependant sure, l'architecte ne peut se désintéresser de la mission d'ingénierie dans le cadre de la mission de conception pour laquelle il bénéficie d'un monopole légal.
L'architecte a de manière certaine les obligations suivantes:
L'obligation de vérifier et de s’assurer qu’un bureau d’études qualifié se charge de la mission d’ingénierie qu’il n’est pas à même d’assumer. Cette obligation nécessite de vérifier que les plans soient bien dressés et rédigé en suffisance. Et surtout qu'ils ont été communiqués à l'entrepreneur en temps opportun.
L'obligation de vérifier qu'il n'y a pas d'incohérences manifestes ou d'erreurs grossières commises par le bureau d'étude. L'ampleur de cette responsabilité sera appréciée suivant que l'architecte a la qualité d'ingénieur ou pas.
On note une appréciation large et souvent défavorable à l'architecte. Les Cours et tribunaux ayant la faiblesse d'apprécier les responsabilités avec un effet "rétroviseur", c'est à dire en ayant connaissance de ce qu'il aurait fallu faire pour éviter le dommage, mais sans se replacer pour autant au moment clé des choix éventuellement fautifs.
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